RDC : mettre fin à la spirale de la violence, du pillage et de la destruction de l’environnement
Il y a un an, nous lancions la pétition « Nature et population ont besoin de la paix au Congo ». Depuis, la situation en RDC s’est dramatiquement dégradée. Pour des centaines de milliers de personnes, c'est une catastrophe. L’environnement est ravagé, l’action de ses défenseurs est limitée, tandis que les milices et les criminels pillent la nature en toute impunité.
Lorsque la violence, le chaos et la misère règnent, la nature est en grand danger. En République démocratique du Congo (RDC), la biodiversité exceptionnelle et les importantes ressources naturelles sont une source de convoitises.
Depuis que les rebelles du M23 ont pris le contrôle de vastes zones dans les provinces du Nord-Kivu et du Sud-Kivu, de grandes étendues forestières ont été détruites. Le parc national de Kahuzi-Biega (PNKB) en est un exemple frappant : des images satellites du programme européen Copernicus, prises en janvier et en juillet 2025, montrent clairement que des zones autrefois couvertes de forêt primaire sont désormais dénudées. Ces images sont accessibles sur la le site d’information Mongabay.
Pillage de la nature par les rebelles, les milices et les criminels
Des personnes engagées dans la défense de l’environnement et des droits humains sur place, que nous gardons anonymes pour leur sécurité, nous ont fait part de leurs observations. De son côté, l’ONU dresse un tableau sombre d’une situation désastreuse en matière de sécurité et de droits humains.
Cette situation expose directement les défenseurs de l’environnement à des risques accrus : arrestations arbitraires, menaces, intimidations et violences physiques.
Un de nos partenaires nous confie que le champ d’action s’est réduit de manière significative. Plusieurs projets de préservation de la biodiversité ont dû être suspendus ou reportés, en raison d’un manque de financement ou de l’insécurité.
Malgré tout, certaines initiatives persistent. Dans plusieurs régions, les éco-gardes poursuivent leurs patrouilles, bien que de façon plus limitée. Les programmes d’agroforesterie et de renforcement des moyens de subsistance alternatifs se poursuivent également.
Notre partenaire prévient :
Si rien n’est fait, dans peu de temps, le PNKB, qui est classé au patrimoine mondial de l’UNESCO, disparaitra.
Là où l’État et les autorités sont faibles, l’exploitation illégale des ressources naturelles s’intensifie.
Un expert de renommée internationale, contraint à la clandestinité après plusieurs tentatives d’assassinat, écrit :
L’exploitation du PNKB et de Virunga a augmenté avec l’arrivée de M23.
Selon lui, les réseaux d’exploitants illégaux étaient déjà en place et se sont encore développés.
Il constate une « division du travail » entre les groupes armés : les milices Wazalendo, fidèles au gouvernement, opèrent à l’intérieur du parc national de Kahuzi-Biega (PNKB), le M23 contrôle les zones périphériques. Les Wazalendo gèrent ainsi l’exploitation du parc national, notamment l’abattage des arbres, tandis que le M23 tire profit du commerce du charbon de bois à Bukavu et Goma.
L’afflux de centaines de milliers de personnes déplacées dans ces deux grandes villes a augmenté la demande en charbon et bois de chauffage. Ce marché alimente une perte massive du couvert végétal.
D’autres sources indiquent que la zone d’influence du M23 d’un côté, et de l’armée et des Wazalendo de l’autre, est en constante évolution et difficile à déterminer. Les groupes armés tirent profit des zones protégées, principalement, via des « taxes » perçues sur les barrages routiers le long des axes commerciaux et de « droits de douane ».
À Bukavu, l’offre de charbon de bois serait désormais si abondante que le prix du sac, autrefois de 80 dollars américains, aurait chuté à seulement 15 dollars. Un nouveau marché s’est développé à Murhesa, le long de la route interurbaine Miti-Bukavu. Sur les photos, on distingue de nombreux sacs blancs servant habituellement au transport de ce combustible.
Les ressources naturelles du PNKB sont détruites. C’est vraiment alarmant. Des arbres majestueux, avec des troncs de un à deux mètres de diamètre, sont abattus à la tronçonneuse pour produire du charbon de bois.
L’exploitation minière se développe également dans le PNKB. Selon des sources locales, des entrepreneurs de Bukavu introduiraient du matériel dans le parc pour chercher de l’or et d’autres minerais. L’or et la cassitérite seraient extraits le long de plusieurs rivières, puis acheminés via Bukavu vers le Rwanda.
Concernant le braconnage, un expert alerte sur le fait que les Wazalendo qui pénètrent dans le parc national ont pour seule source de nourriture que celle qu’ils y trouvent.
Cela nous inquiète de vivre une perte totale de la biodiversité dans cette partie du parc.
Les activistes de RDC continuent de travailler avec beaucoup d’engagement, malgré les risques, dans la mesure de leurs moyens. Chaque jour, nous nous demandons comment nous pouvons les soutenir à distance et les aider à préserver cette nature menacée.
Des pétitions pour alerter et faire pression
Au cours des treize derniers mois, Sauvons la forêt a lancé trois pétitions, qui ont toutes pour toile de fond le même drame : la violence dans l’est de la RDC et ses conséquences dévastatrices sur la population et la nature.
Ces pétitions forment un ensemble, chacune mettant en lumière un aspect spécifique : la nécessité d’une paix politique, la protection des activistes engagés sur le terrain, et la dénonciation des causes économiques de la violence, ainsi que de la responsabilité du Nord global.
1- Nature et population ont besoin de la paix au Congo
Dans cette première pétition, nous affirmons que sans la fin des violences, ni la sécurité de la population ni la protection des forêts ne sont possibles.
Notre appel au président de la RDC, Félix Tshisekedi, ainsi qu’aux représentants de l’ONU et de l’UE : « L’est du Congo a besoin de sécurité et de paix. Sans celles-ci, respect des droits humains et protection de la nature resteront illusoires. »
À ce jour, la pétition a recueilli 53 563 signatures.
2- RDC : les écologistes ont aussi besoin de protection !
Cette pétition expose les dangers croissants auxquels sont confrontées les personnes engagées dans la protection de la nature au Congo.
Notre appel à la ministre de l’Environnement et du Développement durable de la RDC et aux bailleurs internationaux de la CAFI : « Mettez fin aux persécutions contre les personnes engagées dans la protection de la nature et des droits humains. Renforcez la protection de l’environnement. »
À ce jour, la pétition a recueilli 64 909 signatures.
3- RDC - Rwanda : l’exploitation des ressources naturelles exacerbe la violence
Cette troisième pétition porte sur l’un des principaux facteurs du conflit : l’exploitation des ressources minières et forestières. Elle établit un lien entre l’extraction de minerais, tels que l’or ou le coltan, et le financement des milices. La pétition dénonce la responsabilité du Rwanda, mais aussi celle de l’UE à qui elle demande de résilier son partenariat sur les matières premières critiques.
Notre appel aux institutions et aux gouvernements des États membres de l’UE : « Annulez le protocole d’accord sur les matières premières critiques avec le Rwanda, qui est coresponsable de la violence et de la destruction de la nature en RDC. »
À ce jour, la pétition a recueilli 55 534 signatures.
Les trois pétitions portent un appel commun et urgent : « Il faut mettre fin à la spirale de la violence, au pillage des matières premières et à la destruction de l’environnement – pour les populations et les forêts du Congo. »
À ce jour, elles ont déjà recueilli ensemble 174 000 signatures. Nous comptons les remettre prochainement sous forme de dossier aux gouvernements, à l’Union européenne et aux Nations unies.
Celles et ceux qui ne l’ont pas encore fait peuvent encore de signer ces pétitions
Mongabay, 31/07/2025 (en anglais) : Uncovering forest loss in gorilla park six months after M23 offensive in the DRC
Le parc national de Kahuzi-Biega abrite des gorilles des plaines orientales (Gorilla beringei graueri), tandis que le parc des Virunga est le refuge des gorilles de montagne (Gorilla beringei beringei). En temps de paix, les touristes peuvent les observer lors de visites encadrées. Toutefois, ces deux sites figurent depuis longtemps sur la liste du patrimoine mondial en péril de l’UNESCO, notamment en raison des violences persistantes et des menaces liées à la prospection pétrolière.
Mongabay, 07/03/2025 (en anglais) : The environmental toll of the M23 conflict in eastern DRC (Analysis)
CAFI : Central African Forest Initiative ou Initiative pour la forêt de l’Afrique centrale
Cette page est également disponible en :

Nature et population ont besoin de la paix au Congo
Depuis 30 ans, la population de l’est de la RDC souffre de la violence. Le conflit est à nouveau très vif et touche la ville de Goma et le parc national des Virunga.

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Le bassin du Congo abrite la deuxième plus grande forêt tropicale de la planète, avec ses gorilles, éléphants et chimpanzés. Nos partenaires la protègent avec courage.