Shell: violences et expulsions pour les agrocarburants au Brésil

Damiana, Guaraní-Kaiowá et guide spirituelle Apyka'y, devant une hutte calcinée pendant les expulsions
16 432 signatures

La situation du peuple indigène Guaraní, dans l'Etat de Mato Grosso do Sul au Brésil, est dramatique. Les partenaires d'affaires du groupe Shell convertissent leurs terres en plantations de canne à sucre pour l'agrocarburant à base d'éthanol destiné au marché européen. Un fait-divers récent montre une nouvelle fois la brutalité des hommes de main qui sévissent en ces lieux: ces dernières semaines, deux villages ont été attaqués, femmes et enfants expulsés, des hommes blessés. « 45.000 Guaraní souffrent là-bas de grave exclusion sociale » déclare la célèbre écologiste et politicienne brésilienne Marina Silva. Ils ont besoin de notre soutien.

Mises à jour Appel

Au Mato Grosso do Sul, un état du sud-ouest brésilien, le front du sucre passe à l'attaque. Par sa coopération avec Cosan, le plus grand producteur de sucre du Brésil, le groupe pétrolier anglo-néerlandais Shell est devenu l'un des propriétaires les plus puissant du pays. A travers ses filiales, Shell exploite plantations et usines dans cette région. Depuis plusieurs années, les Guaraní-Kaiowá luttent contre l'expansion des plantations de canne à sucre car elles les privent de terres, d'eau, de vie.

Une étude de Survival International et de nombreux rapports d'observateurs internationaux font état de la souffrance des Guaraní. Ils vivaient jadis en communion avec la terre, la cultivant de façon durable. Le territoire que les Guaraní appellent Tekoha est le centre de leur identité culturelle. Ceux-ci l'ont perdu à cause des élevages et des plantations de soja et de canne à sucre dont les grands propriétaires n'hésitent pas à recourir à la violence pour faire valoir leurs intérêts. Les indiens sont victimes d'assassinat (42 d'entre eux furent abattus par des exploitants agricoles en 2008), de sous-nutrition et de mortalité infantile (étant très supérieures aux moyennes nationales), d'arrestations arbitraires fréquentes. On peut certainement trouver là les raisons pour lesquelles les Guaraní sont le groupe ethnique ayant le plus fort taux de suicide d'Amérique du Sud.

Informations supplémentaires

Les conséquences sociales de la culture de la canne à sucre ne sont pas les seules à être choquantes. Une étude menée par plusieurs instituts renommés alerte sur les menaces indirectes pour les forêts tropicales. L'expansion extrême de la canne à sucre pour la production d'éthanol évince les autres formes d'exploitation intensive des terres, notamment l'élevage. Les éleveurs de bétail sont en quête de nouveaux terrains dans la forêt tropicale. Au cours du premier semestre de 2011, le taux de déforestation de l'Amazonie brésilienne a augmenté de 79% par rapport à la même période l'année précédente.

Veuillez signer la lettre de pétition demandant à Shell d'intervenir pour faire s'arrêter les pratiques méprisant la dignité humaine et l'environnement de son partenaire au Brésil.

Contexte

Depuis que l'Europe subventionne les « biocarburants » à coup de millions, la demande ne cesse d'augmenter, appelant à son tour à une offre plus importante des combustibles végétaux. La canne à sucre cultivée sur des zones immenses amène la prospérité à quelques-uns pendant que les autres bien plus nombreux tombent dans la misère.

Shell forme avec Cosan depuis 2010 la joint-venture « Raízen ». Pour Shell cela procure un accès optimal aux ressources foncières et naturelles du Brésil. Par l'intermédiaire de Shell, Cosan s'ouvre au marché européen.

A travers ses filiales, Raízen exploite des plantations et des usines. Dans le Mato Grosso do Sul, Nova América, une filiale de Raízen, est en affaires avec des gros producteurs dont les plantations sont situées en plein territoire indien, en violation flagrante du droit national et international.

Un procureur brésilien avait déjà lancé un appel à Shell en soulignant que ses affaires dans le Mato Grosso do Sul allaient à l'encontre de ses propres directives d'entreprise. Avec Cosan, Shell s'est lié en effet à un partenaire connu pour ses pratiques sordides.

La société Cosan est depuis 2010 sur la liste noire des esclavagistes du ministère du travail brésilien. En 2007, 42 travailleurs-esclaves ont été libérés d'une usine sucrière de Cosan. Entre 1995 et 2009, un total de 36.192 travailleurs-esclaves ont été racheté au Brésil dans les plantations de canne à sucre.

Les conditions de vie dans les plantations de canne à sucre brésiliennes sont catastrophiques. Un ouvrier agricole doit couper de 12 à 20 tonnes de canne par jour, sans vêtements de protection, dans des champs pollués par les pesticides. Pendant la saison des récoltes, des échantillons de sang prélevés sur les travailleurs ont montré un haut degré d'intoxication. Malgré les promesses d'emploi et de prospérité, la culture de la canne à sucre se concrétise par l'exploitation humaine et la pollution.

Les Guaraní se défendent comme ils le peuvent. Ils abandonnent leurs « camps de fortune » le long des routes pour retourner dans les terres dont ils furent illégalement expulsés. Les grands propriétaires y répondent par la violence. Ils envoient des mercenaires ne faisant aucune distinction entre hommes, femmes, enfants et personnes âgées. Les personnes à la tête des protestations sont particulièrement visées par ces criminels rémunérés. En assassinant le meneur Marcos Veron, septuagénaire abattu devant les yeux de sa famille, les exploitants des plantations ont essayé en vain de casser le mouvement de résistance indigène. Mais les Guaraní se battent encore et toujours pour faire valoir leurs droits.

Lettre

Shell France
M. Patrick Roméo, Président des Sociétés du Groupe Shell en France
Immeuble les Portes de la défense
307 rue Estienne d'Orves, 92700 Colombes
Tél.: 01 57 60 61 00 , Fax: 01 57 60 62 99
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Monsieur Roméo,

Je suis indigné d'apprendre qu'au Brésil des filiales de la joint-venture Raízen ont ostensiblement violé les conventions nationales et internationales relatives aux droits de l'homme.

Dans l'Etat de Mato Grosso do Sul, le groupe indigène Guarani-Kaiowá pâtit depuis plusieurs années de l'expansion des champs de canne à sucre. La communauté a été expulsée. Certains de ses membres ont été brutalisés et assassinés. Les Guaraní souffrent de sous-nutrition extrême et connaissent pour cette raison le plus fort taux de suicide d'Amérique Latine.

Le groupe Shell / Cosan détient des parts importantes dans les usines sucrières de la région et est un grand consommateur d'une canne à sucre cultivée aux détriments de la population locale.

L'expulsion de la communauté indigène en dehors de ses territoires légalement reconnus est un acte criminel car il enfreint l'article 231 de la constitution brésilienne. En outre, des filiales et partenaires d'affaires de Shell violent l'article 10 de la Déclaration des droits des peuples autochtones de l'ONU.

Royal Dutch Shell aime se présenter comme un grand groupe international ayant une responsabilité morale, agissant dans la légalité, et s'engageant à garantir le respect des normes sociales et environnementales à tous les niveaux de production. Shell a aussi le devoir d'exiger de telles normes de la part de ses partenaires, et de veiller à leur application. En s'abstenant de le faire, Shell va non seulement à l'encontre de ses propres directives mais se rend aussi complice des violations des lois nationales et internationales.

En outre, des scientifiques issus de plusieurs instituts de recherche renommés (comme l'Institut Max-Planck) ont mené une étude dans laquelle est démontrée que l'expansion des plantations de canne à sucre, menant à une modification indirecte de l'utilisation des sols, contribue à la déforestation en Amazonie brésilienne. Les conclusions scientifiques établissent que la production d'éthanol au Brésil ne remplit pas les critères environnementaux et de durabilité de Shell.

Je vous exhorte soit à rompre vos relations d'affaires avec Cosan, Nova America et autres sous-traitants brésiliens soit à les obliger à respecter les lois nationales et internationales relatives aux droits de l'homme. J'en profite pour inciter le groupe Shell à investir pour des formes d'énergies renouvelables, c'est-à-dire réellement durables, telles l'énergie solaire ou éolienne. Car la seule concentration vers les agrocarburants (soit-disants «biocarburants») ne saurait répondre à vos propres critères de durabilité et de respect de l'environnement.

Je vous prie d'agréer, Monsieur Roméo, l'expression de mes respectueuses salutations.

Mises à jour

succès · 29 janv. 2013

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succès · 14 juin 2012

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