Soja - questions et réponses

Un avion pulvérise des pesticides sur un champ de soja Un avion pulvérise des pesticides sur un champ de soja (© istock.com)

Escalope de porc, côte de bœuf, cuisse de poulet… de plus en plus de viande atterrit dans nos assiettes. Les animaux, parqués dans des fermes industrielles où ils sont entassés dans de minuscules cages et engraissés avant d’être abattus, ne sont pas les seuls à en pâtir. Les forêts tropicales sont aussi victimes de notre appétit carnassier.

Définition : Qu’est-ce que le soja ?

Le soja est une légumineuse faisant partie des plantes les plus cultivées au monde. À l’origine, la graine de soja était un aliment apprécié en tant qu’alternative à la viande comme source de protéines. Avec l’accroissement de la demande en fourrage destiné à l’élevage intensif, les surfaces cultivées de soja se sont multipliées.

Pourquoi le soja joue-t-il un rôle si important dans l’élevage intensif ?

Riche en protéines végétales, en fer, magnésium et autres minéraux, la graine de soja est un aliment particulièrement favorable à la croissance. De plus, le soja est disponible sur le marché en grandes quantités et à bas prix. Sous la forme de fourrage, additionné de compléments hormonaux et antibiotiques, le soja permet aux usines d’animaux de produire une grande quantité de viande, d’œufs ou de lait de manière rapide et économique, tout en engrangeant plus de bénéfices.

Quelle est la quantité de soja cultivée dans le monde ?

En raison d’une demande toujours plus élevée, la production de soja a décuplé depuis 1960 pour atteindre 260 millions de tonnes. La production de soja est déjà plus qu’aux trois quarts constituée de soja génétiquement modifié ou « transgénique ». Chaque année, l’UE importe environ 34 millions de tonnes de soja, provenant essentiellement d’Amérique du Sud, pour l’alimentation des animaux. Ceci correspond à une surface terrestre accaparée de 15 millions d’hectares, soit la taille conjuguée de la Belgique, des Pays-Bas et de l’Autriche. L’Allemagne importe près de 5 millions de tonnes et occupe ainsi 2,8 millions d’hectares de terres. Le soja importé est en majorité du soja transgénique utilisé comme complément alimentaire pour l’élevage intensif. En Argentine, le soja transgénique représente 99% de la production, aux États-Unis 90% et au Brésil plus de 65%.

Pourquoi les forêts tropicales sont-elles déboisées pour le soja ?

Depuis 1960, la surface cultivée mondiale de soja a quadruplé pour atteindre 100 millions d’hectares. Le soja est principalement cultivé aux États-Unis et en Amérique du Sud. Les forêts tropicales et d’autres écosystèmes riches en biodiversité comme la savane du Cerrado sont défrichés pour faire de la place aux gigantesques monocultures de soja. Des millions de petits agriculteurs du Brésil, d’Argentine, du Paraguay, de Bolivie et d’Uruguay, dont de nombreux autochtones, perdent leurs terres et leurs revenus. La culture du soja occupe d’ores et déjà plus de 45 millions d’hectares de terres dans ces pays, soit une superficie plus vaste que l’Allemagne et l’Autriche.

Pousse-t-il également des plantes riches en protéines pouvant servir de fourrage en Europe ?

Tout à fait. Le pois et le haricot fourrager, la luzerne et le lupin en font partie, ainsi que le soja cultivé sur le continent. Dans l’agriculture biologique, ces légumineuses sont même indispensables à la rotation des cultures. En effet, elles enrichissent le sol d’azote et rendent inutile l’utilisation d’engrais minéraux.

Je mange du soja, est-ce mauvais pour moi ou pour la planète ?

Les gens ne consomment directement que 2% de la production mondiale de soja. 98% des récoltes de soja sont consacrées à l’alimentation animale. Si chaque personne couvrait ses besoins en protéines par du soja au lieu de la viande et du lait, cela serait cinq fois moins nuisible à l’environnement. La graine de soja contient les huit acides aminés essentiels qui ne sont pas produits naturellement par le corps humain, ce qui lui vaut d’être baptisée « viande de la terre » par les Chinois. D’un point de vue nutritionnel, les personnes qui mangent du soja n’ont pas besoin de protéine animale. Le mieux est d’acheter des produits à base de soja biologique de provenance locale et d’alterner avec d’autres légumineuses (haricots, pois, lupins, lentilles). Le seitan est une autre alternative savoureuse à la viande.

La culture du soja nuit-elle à l’être humain et à la nature ?

Le matériel génétique du soja transgénique, qui représente au moins trois quarts des récoltes mondiales de soja, a été modifié artificiellement dans des laboratoires industriels pour permettre à la plante de résister au glyphosate, un herbicide total. Le groupe nord-américain Monsanto, racheté par Bayer depuis juin 2016, vend non seulement des graines de soja transgénique mais aussi l’herbicide en question, commercialisé sous le nom de Roundup (voir question ci-dessous).

En quoi suis-je concerné.e par le soja transgénique ?

En France et en Europe, les aliments génétiquement modifiés ne sont pas les bienvenus. Les produits OGM doivent être clairement étiquetés en tant que tels, ce qui les rend pratiquement invendables. Toutefois, ceci ne vaut que pour la viande, les œufs ou le lait d’animaux ayant été nourris avec des aliments génétiquement modifiés. Cela laisse une brèche ouverte, par laquelle le soja transgénique s’engouffre massivement dans nos aliments. Seuls les producteurs bio excluent les OGM.

Pourquoi le soja transgénique nuit-il à l’environnement ?

L’impact environnemental du soja transgénique et ses risques pour la santé sont encore insuffisamment étudiés et connus. De plus en plus d’herbes sauvages immunes à l’herbicide Roundup se propagent dans les champs de soja transgénique. Pour éliminer ces plantes, il devient nécessaire d’utiliser tout un cocktail de produits chimiques hautement toxiques. Ainsi, au lieu de réduire l’utilisation de produits chimiques, le génie génétique la démultiplie.

Pourquoi le pesticide Roundup est-il dangereux pour la santé ?

Le principe actif de l’herbicide total Roundup est le glyphosate. Variante du défoliant Agent Orange pulvérisé durant la guerre du Vietnam, ce produit chimique est entre autres à l’origine d’affreuses malformations chez les enfants. Son mélange avec des agents mouillants rend le Roundup encore plus toxique que le glyphosate seul. Cependant, le fabricant Monsanto a fait appel de la recommandation urgente de l’Office fédéral pour la protection des consommateurs et la sécurité alimentaire (BVL) de remplacer l’adjuvant problématique dans le mélange, la tallowamine.

Des études indépendantes montrent que le Roundup endommage les cellules, et ce jusqu’à la nécrose : les cellules meurent de manière incontrôlée et peuvent entraîner de graves lésions des tissus. Un taux anormal de malformations congénitales a été mis en évidence dans les zones de culture de soja transgénique. De plus, la recherche montre que le Roundup endommage le patrimoine génétique humain, perturbe le système endocrinien, complique la reproduction, est cancérigène et cause des lésions nerveuses.

L’Organisation mondiale de la santé (OMS) de l’ONU a classifié le glyphosate comme « potentiellement cancérigène pour l’homme » le 20 mars 2015. Cette classification s’applique également au malathion, au diazinon, au tétrachlorvinphos et au parathion, les quatre insecticides utilisés dans l’agriculture.

Le soja ne profite-t-il pas aux pays producteurs ?

La culture commerciale du soja est monopolisée par les investisseurs et les groupes agroalimentaires. En Amérique du Sud, elle est majoritairement destinée à l’export. De ce fait, les pays producteurs sont presque purement des exportateurs de matière première. Les exportations de soja génèrent certes des recettes fiscales mais les préjudices causés à la nature et aux habitants sont énormes. Les forêts tropicales sont détruites, les sols et les cours d’eau contaminés et épuisés, les petits agriculteurs expulsés de leurs terres et des régions entières dépeuplées. La population locale parvient de moins en moins bien à subvenir à ses besoins et de plus en plus de personnes s’enfoncent dans la misère et la dépendance.

Le prix du soja sur le marché mondial fluctue très fortement, faisant de la graine de soja un objet de spéculation convoité sur les bourses de matières premières. Pour les groupes agroalimentaires étrangers comme Monsanto, la vente de semences de soja transgénique et de son cocktail de pesticides pendant est un marché juteux.

Le label de soja « Table ronde pour un soja responsable (RTRS) » est-il à recommander ?

L’industrie et le WWF veulent tirer le rideau sur les problèmes causés par les monocultures de soja à coup de « labels de durabilité ». C’est ainsi que la Table ronde pour un soja responsable (Roundtable for responsible Soy – RTRS) a vu le jour. Ce label est purement mensonger et relève de la duperie. Des millions d’hectares de monocultures de soja industrielles ne sont ni écologiquement durables, ni socialement équitables. Ce label est même apposé sur du soja transgénique.

Les premières entreprises certifiées RTRS appartiennent au groupe brésilien Andre Maggi, le plus grand producteur mondial de soja et également le plus néfaste. Des images satellites permettent de constater l’étendue du déboisement de la forêt tropicale pour faire place aux plantations dans l’État fédéral du Mato Grosso. De plus, la majeure partie des livraisons de soja transgénique certifié ne provient pas des entreprises labellisées mais est tout simplement acquise sur le marché mondial. Ceci est rendu possible par un autre tour de passe-passe : la méthode du bilan massique.

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