Le label FSC

Plantation d’eucalyptus en Afrique du Sud destinée à la fabrication de cellulose © Rettet den Regenwald / Mathias Rittgerott

Il y a plus de 20 ans, le bois tropical était invendable. Sauvons la forêt et d’autres défenseurs de l’environnement avaient appelé à un boycott des bois tropicaux. Puis le label FSC est arrivé. Mais ce bois tropical certifié dessert la forêt tropicale et ses habitants : l’habitat le plus riche en biodiversité de la planète continue d’être détruit.

Le label du bois FSC aide-t-il la forêt tropicale ?

Que signifie FSC ?

Le FSC (Forest Stewardship Council) se présente comme une association à but non lucratif mais derrière laquelle se cache la société à responsabilité limitée « Forest Stewardship Council International Center GmbH » basée à Bonn en Allemagne. Dévoué à la certification de forêts et de plantations industrielles, il est subventionné depuis des années par l’aide au développement allemande. Né en 1993 à grand renfort de publicité, le FSC s’est établi plusieurs années au Mexique avant de déménager en Allemagne.

L’objectif du label FSC : inciter les consommateurs à acheter du bois tropical, mais en se donnant bonne conscience. Celles et ceux qui se préoccupent du sort des forêts tropicales recherchent donc le label FSC lors d’un achat de meubles ou de parquet. Les clients pourraient ainsi distinguer le « bon » bois du « mauvais » bois dans les magasins de bricolage ou de meubles, le « bon » bois portant le label représenté par le logo d’un arbre et le sigle FSC.

Car le FSC promet de « promouvoir une gestion responsable des forêts de la planète », dont l’objectif serait d’être « appropriée du point de vue environnemental, socialement bénéfique et économiquement viable ». Dans la pratique, ceci est toutefois sujet à controverse. De manière générale, c’est l’objectif de rentabilité qui prime car la biodiversité pâtit considérablement de la coupe de bois industriel certifié. Le FSC ne se considère lui même pas comme un « label écologique », comme le dirigeant du FSC le soulignait dans une lettre adressée à Sauvons la forêt en juillet 2012 : « Votre affirmation selon laquelle le FSC est un écolabel est fausse et sans fondement. »

La destruction des forêts tropicales se poursuit sans relâche

Bilan après 19 ans de FSC : 70 millions d’hectares de bois et 50 millions d’hectares de forêts et de plantations industrielles dans le monde sont certifiés, ce qui correspond à 3% de la surface forestière mondiale. À l’origine, la certification était conçue pour les bois tropicaux. Avec sa brochure « L’empreinte de FSC : l’impact du FSC dans les tropiques », l’organisation tente de défendre cette prétention par l’image. Mais la réalité des chiffres traduit tout autre chose : dans les tropiques, seuls 13% des surfaces sont certifiées FSC. Et en dépit du FSC, et des près de 50 autres labels forestiers existants, le déboisement de la forêt tropicale continue sans relâche.

Les groupes forestiers qualifient leurs actions de « gestion forestière responsable ». Selon le crédo répandu, l’abattage certifié valoriserait les forêts, sans quoi elles risqueraient d’être entièrement détruites. Ainsi, chaque arbre abattu contribuerait à la protection de la forêt tropicale et au développement humain. D’autres organisations environnementales telles que l’antenne suisse du World Wide Fund For Nature (WWF) sont à mettre dans le même panier. Celle-ci a déclenché une véritable frénésie des labels : outre le bois, l’huile de palme, le soja, le coton, le poisson et les crevettes ont entre autres droit à leur propre certification.

En réalité, les dernières parcelles intactes de forêt tropicale de la planète sont envahies de bûcherons qui détruisent l’habitat et les moyens de subsistance des autochtones, le tout avec la bénédiction de FSC et WWF. Ce que l’on néglige toujours, aujourd’hui comme hier, c’est qu'il n’existe aucune forme durable d’abattage industriel de bois en forêt tropicale reconnue scientifiquement. Il n’est ni durable, ni responsable d’abattre les arbres géants de la forêt vierge, de pulvériser une grande partie des arbres restants pour dégager des voies d’accès, de nuire au climat et de détruire les moyens de subsistance des habitants de la forêt.

Les plantations industrielles certifiées sont des déserts verts

Qui plus est, les plantations de bois industrielles se multiplient avec l’aide du FSC. Plus de 40% des surfaces certifiées par le label ne sont pas des forêts mais des zones de plantation ou d’énormes monocultures industrielles d’eucalyptus, de pins et d’acacias. Ces arbres, généralement issus d’essences exotiques à croissance rapide du même âge et clonées (c’est-à-dire des plantules génétiquement identiques obtenues en laboratoire) n’ont absolument rien à voir avec des « forêts ».

Ces monocultures n’offrent guère d’habitat à la faune et à la flore, dégradent les sols, perturbent l’équilibre hydrologique et chassent les populations locales. Les quelques espèces arrivent à subsister dans les plantations industrielles sont anéanties par les pulvérisations d’herbicides, ou, comme les babouins d’Afrique du Sud qui se nourrissent de pousses d’arbres, sont abattues par milliers. Des organisations de protection de l’environnement et des droits humains du monde entier, comme le World Rainforest Movement, luttent contre ces déserts verts certifiés.

Un grand nombre de ces plantations industrielles certifiées se propagent aux dépens des forêts naturelles et d’autres écosystèmes. Et ce, non seulement dans les pays du Sud comme le Brésil, l’Afrique du Sud ou l’Indonésie, mais aussi en Scandinavie ou en Russie. Les forêts vierges sont dans un premier temps déboisées par des coupes à blanc puis transformées en plantations industrielles pauvres en espèces. L’organisation environnementale suédoise SSNC en fait état dans son rapport « Cutting the Edge ».

FSC rejette les protestations des habitants

Seules les populations autochtones ont su jusqu’à présent préserver et défendre les forêts tropicales de par leur mode de vie traditionnel et respectueux des ressources. Cependant, dans les pays industrialisés, ce mode de vie est considéré comme archaïque. Très souvent, les autochtones ne sont absolument pas consultés au sujet de l’octroi des concessions et personne ne les informe ou ne leur demande leur consentement. Pire encore : les plaintes des habitants contre l’irruption des bulldozers et des tronçonneuses dans leur forêt sont balayées comme étant sans fondement, les responsables brandissant leur label comme un bouclier.

Dans sa brochure sur le bois tropical, le FSC décrit comme un exploit le sauvetage de quelques arbres et zones exceptionnels dans le bassin du Congo, après avoir équipé les Pygmées de GPS. Ce que le FSC passe sous silence : les autochtones luttent pour survivre dans les camps de bûcherons et sont traités comme des intrus sur des terres qui leur appartiennent.

C’est l’économie qui guide le FSC, la transparence n’existe que sur le papier. Bien que le FSC soit divisé en trois chambres au poids électoral égal pour l’environnement, le social et l’économie, c’est cette dernière qui domine. Par conséquent, les normes sont de plus en plus assouplies. Les affaires de fraude et les protestations contre des certifications inadéquates se sont rapidement accumulées. Les pires cas ont été relevés par des défenseurs de l’environnement sur le site https://fsc-watch.com (ancienne page www.fsc-watch.org).

Le cas Precious Woods

Il y a 20 ans, des investisseurs suisses ont fondé la société Precious Woods. Son but est d’apporter une preuve tangible de la viabilité d’une gestion durable, rentable et certifiée de la forêt tropicale. Precious Woods a acquis de vastes surfaces de forêt tropicale au Brésil, au Gabon et dans d’autres pays tropicaux. À la faveur de routes, de camps de bûcherons et de scieries, la société a exploité ces zones pour l’abattage des bois tropicaux et les a certifiées du label FSC.

Toutefois, le label destiné aux forêts tropicales a disparu dans l’État fédéral du Pará au Brésil. Les forêts ont été vendues au plus offrant, des enquêtes pénales visant des trafics fonciers illégaux et des fraudes sont en cours et les actionnaires doivent en permanence réinjecter des capitaux. En l’occurrence, Sauvons la forêt avait dévoilé l’imposture de Precious Woods et du bois tropical brésilien destiné à la protection du littoral en Mecklembourg-Poméranie dès 1998.

Des agents de certification tributaires de la passation de marchés

Le FSC et ses agents de certification accrédités ignorent largement les critiques qui les visent. Les plaintes se perdent dans de longues procédures internes. De plus, les entreprises forestières décident elles-mêmes des agents de certification à engager et les paient directement. Ces derniers n’ont donc aucune indépendance.

La transparence reste une promesse vaine

La transparence, elle aussi, brille par sa rareté. Les clients et le public intéressé n’a aucune visibilité sur l’origine des bois certifiés, sachant que le FSC lui-même n’est pas en mesure de retracer les voies d’approvisionnement, souvent compliquées. Sur demande, le FSC a répondu que seuls les agents de certification ont un droit de regard sur la chaîne de traçabilité. FSC est donc synonyme de confiance aveugle dans le label et ses agents de certification. L’accès aux zones d’exploitation, souvent strictement gardées, est la plupart du temps interdit. Tout contrôle indépendant des activités est donc concrètement impossible.

CONCLUSION

Le marché est incapable de stopper la déforestation. Des systèmes de certification privés et volontaires n’apportent qu’un bouclier de protection confortable et, dans le meilleur des cas, des améliorations purement formelles. Dans ce contexte, des initiatives des pouvoirs publics, des contrôles rigoureux et de lourdes amendes sont nécessaires.

Hormis le FSC, nous vous mettons en garde contre les dizaines d’autres labels du bois existants. Nous vous déconseillons également d’acheter du bois tropical. Achetez plutôt des bois issus d’une gestion forestière locale et naturelle. Et joignez-vous aussi à nos appels à l’interdiction des importations de bois tropical.

 

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